Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/212

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cœurs bien unis, et qu’il est difficile de résister à ses coups charmants ! Mon Dieu, que je sens de foible dans mon âme, et que je me vois peu en état de les repousser. Ah ! Sire, ayez pitié de ma foiblesse !

Le Roi, voulant profiter de ce moment favorable à sa passion, demeure court, et dit auparavant : — Oui, je la vais secourir, cette foiblesse si ravissante, adorable beauté ; mais que dis-je ? des charmes si extraordinaires ne me permettent plus d’avancer, et je sens mes forces qui m’abandonnent. Hélas ! faut-il pour mon malheur, que je me trouve incapable de vous servir ?

Mlle du Tron, rougissant. — Sire, la course est trop pénible pour Votre Majesté.

Le Roi, confus, en l’embrassant. — Mon petit amour, me pardonnez-vous cette infortune ? Hélas ! la nature et le trop d’amour m’ont trahi dans le même temps.

Mlle du Tron. — Oui, oui, mon cher Prince, je n’y songe pas ; c’est un défaut commun aux amants sur le retour.

Le Roi. — Ah ! que votre sincérité me plaît ! il est vrai, Mademoiselle, qu’à mon âge l’on n’est plus bon soldat d’amour. Ce Dieu qui est dans sa vigueur, n’enrôle sous ses étendards que de jeunes personnes capables de soutenir les batailles auxquelles il les expose ; je veux, et je ne puis. O désirs inutiles et qui ne finissent rien !

Mlle du Tron. — Mon Prince, ne vous chagrinez pas ; Votre Majesté sort triomphante d’une attaque amoureuse.

Le Roi. — Que vous êtes bonne, Mademoiselle, d’excuser mes défauts !