Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/245

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Mlle du Tron. — Souffrez, Sire, avant de vous satisfaire là-dessus, que je vous interroge à mon tour, et vous demande s’il est bien vrai que vous m’aimiez autant que vous le dites, si vous n’en aimez plus d’autre que moi, et si vous avez cette noble résolution que je demande à mon amant, qui est de m’être toujours fidèle ? car malgré votre autorité souveraine, j’ose vous déclarer que mon cœur ne se donnera véritablement qu’à ce prix.

Le Roi, l’embrassant. — Hélas ! ma belle enfant, pouvez-vous encore en douter, et ne vous l’ai-je pas fait assez connoître ? Douter de mon amour pour vous et de ma persévérance, c’est douter de la lumière du soleil. Oui, je vous aime et vous aimerai toute ma vie avec la plus forte passion ; l’expérience vous en convaincra à loisir, et s’il est nécessaire de vous en faire des serments…

Mlle du Tron, en riant. — Non, non. Sire, ne jurez point ; j’aime mieux vous croire de bonne foi, que de vous rendre parjure.

Le Roi. — Si vous consentez à mon bonheur, ma chère demoiselle, sans me faire languir davantage, dites-moi donc aussi à votre tour que vous m’aimez véritablement, et récompensez toujours mes feux d’une ardeur réciproque.

Mlle du Tron. — Je me pique, Sire, d’être judicieuse et reconnoissante de ce que l’on a fait pour moi. Mais si Votre Majesté, par un principe de délicatesse, ne peut souffrir le partage de mon cœur, il est juste que je sois aussi jalouse du sien. Eh ! qui me répondra que madame