Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/280

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à notre prince, est le plus beau de tous mes jours et le plus heureux, et la charmante idée que je m’en fais me donne des plaisirs ravissants. »

Le cercle étant fini, chacun se retira chez soi, à la réserve de nos illustres amants, qui ne s’appliquèrent plus qu’à passer agréablement le temps, à se donner les témoignages les plus tendres et les plus sincères de leurs amours[1]. L’on peut dire que le Roi n’en a jamais marqué davantage que pour cette adorable mignonne. Il ne peut pas être plus ardent, et le retour avec lequel cette aimable lui témoignoit le sien, ne pouvoit pas être plus passionné. Elle le fit paroître, lorsqu’étant à Paris, elle apprit de Saint-Germain que le Roi qui va souvent à la chasse avoit couru grand danger dans la poursuite d’un sanglier, que son cheval avoit été blessé par cette bête, et que sans une force et une adresse distinguées, Sa Majesté auroit eu de la peine à se retirer du péril. La nouvelle en fut apportée à mademoiselle de Fontanges par un gentilhomme de madame la princesse d’Epinoy[2], qui étoit elle-même de la partie. Notre incomparable en fut aussi touchée, comme si le mal lui étoit arrivé. Elle tomba dans une tristesse accablante, qui lui dura longtemps, car elle ne pouvoit effacer de son esprit une idée si fatale et qui avoit fait tant de peur à son amour ; mais ayant un peu rassuré sa tendre frayeur, voici ce qu’elle écrivit à Sa Majesté :

« Je n’ai point, mon illustre prince, de termes

  1. Ici, nous rentrons dans le texte du Passe-temps royal, III, 49.
  2. Voy. t. III, p. 49.