Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/282

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Quand le Roi eut marqué à mademoiselle de Fontanges la joie qu’il avoit de la revoir, ils partirent pour Versailles. Ce fut dans ces doux moments, que cette charmante enfant obtint de notre Monarque la grâce qui lui avoit inutilement été demandée par la bouche de plus d’un prince. Il lui accorda une pension considérable en faveur d’une demoiselle de ses amies, et l’abbaye de Chelles[1] dont sa sœur a été pourvue, fut encore un effet de sa libéralité. Hélas ! nous pouvons bien dire que nous n’avons plus rien de cher, quand notre cœur n’est plus à nous, et nous servir de la pensée d’Aristote qui dit que la personne que nous aimons est un autre nous-même.

Mon cœur a changé de séjour,
Où je suis je ne crois pas être ;
Où l’on ne me voit point paroître,
Je m’y trouve par mon amour[2].

Cette nouvelle abbesse fut bénite avec une magnificence extraordinaire. Il ne manqua rien à la cérémonie, étant la sœur de la maîtresse du Roi. Aussi fut-elle honorée d’un grand nombre d’évêques. Toute la Cour y assista, et mademoiselle de Fontanges y parut avec tous les charmes distingués qui lui attirent les regards de tous les spectateurs.

Comme les bois et la solitude assaisonnent souvent les plaisirs que l’on trouveroit fades dans les grandes villes, notre Monarque ne passa pas longtemps à Paris sans retourner à

  1. Voy. t. II, p. 469.
  2. Ces vers ne se trouvent pas dans le Passe-temps royal.