Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/337

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d’or qui en faisoit l’ornement. Le prince, étant entré fort doucement de crainte de l’éveiller, se mit dans une chaise à côté d’elle, en poussant deux ou trois soupirs, qui éveillèrent la charmante enfant, qui ouvrit ses bras à son cher amant, dans le dessein de l’embrasser, quand elle entendit le comte de Souche en bas, qui revenoit de la chasse et qui cherchoit sa femme pour lui faire voir sa prise.

Pendant que le comte alloit de chambre en chambre, le prince de Vaudemont se cacha dans une grande armoire, qui étoit ordinairement dans le cabinet, et que Mme de Souche ferma à clé. Son cher époux étant entré avec elle, l’entretint du bon succès de sa chasse, et lui dit le nombre de petits levrauts que Diane, sa fidèle chienne, avoit arrêtés. Il fit le panégyrique de cette bête, le plus avantageux qu’il put. Cela ennuyoit beaucoup la comtesse, qui savoit le chagrin où M. Desnué se trouvoit, étant fortement retenu dans l’armoire qui le pressoit de tous côtés, n’osant pas même respirer. Après que la comtesse se fut servie de toute sa politique envers son mari, elle lui demanda fort civilement, s’il vouloit venir souper. — « Oui, mon cœur, répondit M. de Souche, car j’ai bien faim ; mais dites-moi, je vous prie, où est M. Desnué, afin que je lui fasse part de mes lièvres ? — Je ne sais, Monsieur, répliqua la comtesse, en contrefaisant l’innocente. Je crois qu’il se promène dans le jardin en attendant le souper. Je le trouve si occupé de ses leçons, qu’il ne fait que rêver. — Voilà la marque d’un bon maître, ma femme, dit le comte, puisqu’il s’attache