Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/348

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des objets adorables, et qu’il ne trouve plus rien chez lui qui réponde à ces offres charmantes, vous l’irritez plutôt que de renouveler sa tendresse mourante. N’est-il pas vrai, Madame, continua ce rusé Père, que ce que nous pouvons avoir facilement nous rebute ? — Mon père, répliqua la Marquise, vous approchez un peu de ce qui chagrine le Roi ; mais je sais que sa véritable peine est le méchant état des affaires présentes. Sa Majesté ne voit point de jour à trouver de l’argent pour fournir à la guerre, qui désole, comme vous voyez, une partie du royaume de France. Les coffres du Roi sont entièrement vides[1], et de l’humeur qu’est ce Prince, il fera comme François Ier, c’est-à-dire que Sa Majesté se servira de sa dernière pièce, comme fit son allié devant Pavie. — Madame, dit le jésuite, nous avons fait tout notre possible pour l’État, et nous ne pouvons plus rien donner du nôtre, ou bien nous serons réduits à la mendicité, qui est une chose déplorable, que des religieux, qui se sont vus autrefois à leur aise, soient aujourd’hui sur le petit pied. — Ce que vous dites est vrai, mon cher père ; mais quelquefois nous ne sommes pas nés pour être tout-à-fait inutiles dans la vie. Notre Monarque a trouvé à propos de se servir de vous, comme de lumière, dans les ténèbres et pour voir clair en toutes ses entreprises. »

La conversation sérieuse auroit encore duré, si frère Antoine[2], qui est un novice nouvellement

  1. Voir plus haut les Amours de Louis XIV et de Mlle du Tron.
  2. Nom imaginaire, comme celui de Mlle Gisson, qui suit.