Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 4, éd. Boiteau, 1876.djvu/350

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confessoit ses péchés à un homme qui avoit le cœur si tendre, elle auroit facilement la rémission de toutes les fautes qu’elle auroit commises, petites ou grandes, ce qui est contre les ordres que la pénitence ordonne et les mortifications de l’Église. Notre charmante dit au frère qu’elle ne se sentoit pas encore assez bas ni assez foible, pour avoir besoin d’un confesseur, que son mal commençoit un peu à diminuer. — « J’en suis ravi, ma chère mignonne, répliqua le frère, en riant, car ce seroit dommage qu’une jolie demoiselle comme vous ne fît plus l’ornement du monde. » — Que je vous trouve obligeant, mon frère, dit cette incomparable ; vous me contez plus de douceurs que jamais l’on ne m’a fait, et vous êtes trop galant pour le monastère. Vous avez très-mal fait de renoncer au monde. — Hélas ! ma belle enfant, ce n’est que la rigueur de votre aimable sexe, répartit le frère, en soupirant, qui m’a inspiré l’envie d’être religieux. Je n’ai aucune inclination au parti que j’embrasse, mais le désespoir où je me suis trouvé en aimant passionnément la plus cruelle qui ait jamais été sous le ciel, et la plus adorable qui fût au monde, m’a fait jeter aveuglément, et sans réflexion, aux Jésuites, trouvant toutes choses ennuyeuses, puisque je ne pouvois pas me faire aimer de la jolie enfant qui me tenoit sous sa loi. Ah ! quel martyre, ma charmante, continua cet amoureux frère, quand on n’a point de réciproque en amour ! — Je vous plains extrêmement, mon frère, répondit modestement mademoiselle Gisson, puisque ce n’est point pour un véritable motif de piété