Page:Byron - Œuvres complètes, trad. Laroche, III.djvu/13

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être fatal ! — Pour l’amour de celui qui t’a créé, ne te tiens pas sur le bord de ce précipice !

Manf. (sans l’entendre). C’eût été pour moi une tombe convenable ; mes os eussent reposé en paix à cette profondeur ; ils n’auraient pas été disséminés sur les rocs, le jouet des vents, — comme ils le seront — quand j’aurai pris cet élan. — Adieu, cieux qui vous ouvrez sur ma tête ; ne jetez pas sur moi ces regards de reproche, — vous n’avez pas été faits pour moi. — Terre, reçois ces atomes !

(Au moment où Manfred va se précipiter, le chasseur le saisit et le retient.)

Le chass. Arrête, insensé ! — Quoique la vie te soit à charge, ne souille pas de ton sang coupable la pureté de nos vallées ; viens avec moi, — je ne te lacherai pas.

Manf. je me sens défaillir, — ne me serre pas tant ; — je ne suis que faiblesse ; — les montagnes tournent autour de moi ; — je ne vois plus rien. — Qui es-tu ?

Le chass. Je te le dirai plus tard, — viens avec moi ; — les nuages s’amoncellent ; — là, — appuie-toi sur moi ; — place ici ton pied, — ici ; prends ce bâton, soutiens-toi un instant à cet arbuste ; — maintenant donne-moi la main, et tiens fortement ma ceinture ; — doucement, — bien, — dans une heure nous serons au chalet ; — viens, nous trouverons bientôt un terrain plus sûr et une espèce de sentier que le torrent a creusé cet hiver : — allons, voila qui est très bien, tu étais né pour être chasseur. — Suis-moi.

ACTE DEUXIÈME.

SCÈNE Ire.

Un chalet au milieu des Alpes de Berne.
MANFRED et LE CHASSEUR DE CHAMOIS.

Le chass. Non, non ! — demeure encore, — tu partiras plus tard : ton esprit et ton corps sont dans un état qui ne permet pas que l’un se confie à l’autre, du moins pendant quelques heures ; quand tu seras mieux, je te servirai de guide ; mais où irons-nous ?