Page:Cérésole - En vue de l’Himalaya.djvu/33

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voyons du train, en passant, les grands emplacements préparés pour la foire ; du bétail se trouve déjà réuni en grande quantité bien que la foire ne commence que dans deux jours. Heureusement que nous passons juste avant — autrement le voyage en troisième aurait été à peu près impossible. Je retrouve avec plaisir le paysage plus varié du nord du Gange : bananiers, bambous, palmiers de diverses descriptions, ricins. Je retrouve sur les fils télégraphiques les mêmes oiseaux bariolés que j’appellerais volontiers, au petit bonheur, perruches ou perroquets, si ces termes ne concernaient plutôt l’Amérique du Sud ou l’Amérique centrale. C’est lamentable d’être un âne en biologie, en zoologie, en ornithologie dans un pays regorgeant d’oiseaux intéressants et de devoir les ramener tous à deux ou trois types, connus depuis l’école enfantine… en disant : une « espèce de perroquet… une espèce de merle ».

Pendant que le train stationne, les mendiants circulent. Pauvre femme misérable atteinte d’une « espèce de lèpre » si ce n’est une vraie lèpre, les sourcils et cheveux devenus blonds, chose horrible chez un Indien ; les jambes et les bras couverts d’ulcère. Pauvre être qui se débrouille comme elle peut, au milieu des voies de garage — abritant sa figure contre le soleil qui aveugle ses yeux attaqués par la maladie. Elle porte un balluchon sordide. Où est-ce qu’elle peut bien aller ? Selon toute probabilité : nulle part — sans destination définie et consciente. Destinée humaine au niveau de celle du moucheron qui apparemment ne sait pas où il va.

Un autre genre de mendiant passe avec un tronc pour collecte. Il a l’air plus digne d’un collecteur officiel — sans doute pour quelque asile de lépreux l’on recevrait la femme vue tout à l’heure. Comme un collecteur pour asile