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LE FORGERON DE THALHEIM

liberté, bêchant, dans les beaux jours, les quatre carrés du jardinet où croissaient les légumes vigoureux et frais. J’oubliais le linge de Robert, d’une blancheur éclatante, séché au soleil, sur une corde ou sur la haie vive, devant l’habitation, besogne délicate où Käthel déployait toute son habileté.

Le soir, lorsque la forge avait éteint son feu, après le souper, Robert s’asseyait près de sa mère, à la table de chêne massif, dont les bords usés attestaient le long service qu’elle avait fait dans la famille. Un livre ouvert devant lui, la tête dans les mains, tranquille et presque content, il lisait, ou étudiait, ou rêvait, et la veuve, tout en filant sa quenouillée, le regardait, l’admirait, le contemplait, et parfois, fatiguée de l’emploi de sa journée, s’endormait, ses doigts blancs tordant encore machinalement le fil. — Si l’ouvrage était intéressant, après l’avoir parcouru, une, deux fois, il en parlait à sa mère, lentement, d’une voix grave, souvent émue. C’était comme une seconde jouissance, plus sensible, puisqu’il y mettait du sien, la forme et l’accent. De préférence, par goût et par habitude, il recherchait les sujets d’histoire, les pages de la Révolution, de l’unique, de la