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le forgeron de thalheim

rire effleurait ses lèvres, illuminait sa grave figure. C’est que le brave garçon se savait aimé. Une profonde émotion s’était emparée de lui, l’émotion que cause un événement heureux qu’on n’attend pas, une destinée sereine qu’on n’ose point espérer. Suzanne l’aimait ! Alors, que lui importaient les projets de son père, les visites d’Otto Stramm, les surprises de l’avenir ? Il était sûr d’elle ; la mère n’est pas si sûre de son enfant. Elle serait à lui une vie durant ; tous les jours, le matin, le soir, la voix argentine de Suzanne égrènerait dans le logis, le jardin et le verger, ses éclats de rire joyeux et sonores. Et le jeune homme croyait déjà la voir, la voyait, en jupe simple, la taille bien moulée, ses blonds, cheveux noués en torsade sur une nuque d’albâtre, que caressaient des frisons dorés. Quel enchantement ! Quelle pluie de rayons de soleil dans l’existence du forgeron de Thalheim !

Et il souriait de nouveau à toutes ces joies de la vie à deux, qui ne pouvait le fuir, puisque Suzanne était sincère et forte : elle serait à lui, ou demain, ou plus tard. Il n’avait encore que vingt-sept ans. Joseph