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LE FORGERON DE THALHEIM

Jean Schweizerl frisait la soixantaine ; il paraissait encore plus vieux que son âge. Depuis un temps immémorial, du moins la mère de Robert s’exprimait ainsi, Jean était une pratique de la forge. Les haches du bûcheron avaient une bonne renommée ; elles mordaient le bois à grands éclats et, Jean éprouvait une espèce d’orgueil en déclarant que son ami Jacques Feller pouvait seul les forger ainsi, dures et brillantes. De là était née, entre le bûcheron et le forgeron, une profonde sympathie que la mort n’avait pas brisée, car Robert conservait pour le compagnon de son père l’affection loyale de l’auteur de ses jours.

Georgette, la fille de Jean, avait dix-huit ans. Ses yeux noirs, bien fendus, laissaient filtrer entre de longs cils bruns comme une flamme douce qui réchauffait le cœur. Ses cheveux étaient abondants, avec ce reflet bleuâtre que moirent les rayons du soleil. Ils tombaient en deux tresses épaisses sur des épaules rondes et, dénoués, ils pouvaient s’enrouler autour d’une taille exquise, ni trop forte, ni trop faible. On l’appelait la bûcheronne.

S’aimaient-ils, Robert et Georgette ? Non, à