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Discours de Papineau

n’avait pas été comprise ni admise à cette époque. L’Angleterre était persécutrice chez elle, folle et injuste ; elle fut folle et injuste ici, ici plus qu’ailleurs, car le droit public devait nous éviter ce mal. Elle l’ignora. Si elle s’était restreinte à des mesures protectrices pour la minorité, elle était à louer ; si elle a dépassé le but, si elle a opprimé la majorité, elle a fait le mal. Mais c’était alors l’erreur commune qui l’égarait et qui l’excuse. Les lois odieuses de l’intolérance sont aujourd’hui répudiées par tout le monde civilisé, hors Rome et Saint-Pétersbourg. Là aussi, tôt ou tard, il faudra en venir à la force du droit, à la vue des bienfaits qu’il déverse sur les états qui le respectent.

La concision du mot de Cavour : L’Église libre dans l’État libre, est un des plus beaux titres au respect, à l’amour justement acquis à ce grand homme d’état. Ces mots heureux qui, une fois prononcés, ne peuvent jamais être oubliés, en une courte sentence, contiennent tout un code complet sur le sujet qu’ils exposent et expliquent, font – comme si les langues de feu du Cénacle avaient touché tous ceux qui les retiennent – en un instant connaître, aimer et proclamer la pleine vérité qu’ils n’avaient qu’obscurément entrevue et timidement aimée. Et pourtant cette révélation, soudaine pour beaucoup, est depuis longtemps codifiée pour tous, dans les trente-six États de l’Union voisine.

Les églises libres, indépendantes, séparées de l’État, ne lui demandant rien, en présence les unes des autres, sont les plus heureuses et deviennent des plus édifiantes, à raison de cette séparation d’avec l’État et de cette proximité entre rivales. Elles ont pour soutien leur travail et leurs vertus et n’en demandent pas d’autres. Elles ne manquent de rien de ce qu’elles jugent utile à la pompe du culte, à l’aisance convenable de tous leurs ministres, à leurs œuvres de bienfaisance et de charité. Se surveillant les unes les autres, elles sont éminemment morales, parce que l’éclat et la publicité puniraient quelques fautes commises. Aucune faute ne pouvant passer impunie, il n’y en aura que rarement. Où une église seule régnera, elle sera mal édifiante, elle élèvera des bûchers pour les hérétiques,