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La Fuite de Papineau

entre les deux races, car ils étaient loin de penser que les générations subséquentes seraient si peu soucieuses de leurs gloires nationales au point de les murer dans l’oubli.

Les Anglais avaient mille et une raison de pendre Papineau, dont la moindre étaient les papiers compromettants trouvés chez Nelson, parmi lesquels se trouvait une lettre du chef de l’insurrection concernant la révolte du Haut-Canada :

« Je vois qu’il en est d’eux comme de nous, sans que nous nous soyons concertés… Les jeunes gens achètent des armes et s’exercent à s’en servir. L’excitation est grande ; ils veulent envoyer une députation de sept membres à la convention, comme ils appellent cela, un congrès des deux provinces dans lequel on préparera un projet de constitution purement démocratique. On dira ensuite à l’Angleterre que c’est ce que nous devons avoir sous son administration, si elle veut nous rendre justice. Si elle ne nous l’accorde pas, nous l’obtiendrons malgré elle. »

Voici une preuve tangible, autre que celle que le vent emporte, que Papineau était las des moyens constitutionnels dont il avait constaté l’inanité. Pourquoi les Anglais ne dirigeaient-ils pas leurs huit mille soldats sur Papineau pour l’arrêter ? Qu’y avait-il en cet homme pour tenir en échec les menées sourdes des intrigants et les entreprises des bureaucrates ? Croyaient-ils que ce sang, comme celui de saint Janvier, pouvait plus tard se liquéfier et se mettre à bouillonner sur l’autel de la patrie, à chacun de ses anniversaires, jusqu’à la consommation des siècles ?