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Page:Côté - Papineau, son influence sur la pensée canadienne, 1924.djvu/227

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Papineau

tier, Nelson et Ludger Duvernay.

On gracia les autres prisonniers politiques. Cet acte d’absolutisme fut diversement apprécié par la presse. Les loyaux se pourléchaient déjà les moustaches à l’idée que du sang de rebelles coulerait à flots. Quant aux Anglais, la clémence de Lord Durham les exaspéra. Ils en appelèrent en Angleterre de ce qu’ils appelaient une décision arbitraire. Ceux qui avaient la tête hors de la gueule du loup furent les premiers à critiquer l’incorrection de l’expédient qui leur donnait la vie sauve. Ô perfidie de la politique ! les Chambres désavouèrent la mesure du gouverneur, laquelle, au fond, satisfaisait tout le monde.

Lord Durham apprit avec une indignation fort bien jouée la condamnation de son acte d’absolutisme. Il fut rappelé en Angleterre à sa grande satisfaction. Québec, qui se doutait de ce qu’il devait à la diplomatie de l’homme d’état anglais s’affligea encore une fois de son départ.

M. Colborne hérita du gouvernement de la colonie après la disgrâce de M. Durham. Celui-ci en lui jetant son manteau, oublia de lui laisser son gantelet de velours pour atténuer la rigueur de la main de fer. Mais il n’avait pas fait voile depuis longtemps, que l’insurrection éclatait, comme de plus belle. Une armée de plusieurs centaines de patriotes, sous la conduite du « futur président de la république canadienne », Robert Nelson, frère de Wolfred Nelson, augmentée de nombreuses recrues et grâce aux armes que les Américains, ces neutres obligeants, s’étaient laissé voler, crut devoir prendre une nouvelle offensive contre les Anglais.

Un groupe de citoyens pondérés, rendus prudents par les échecs essuyés précédemment, essayèrent de dissuader les patriotes de leur téméraire entreprise, en leur disant que la valeur et l’enthousiasme n’ont pas toujours raison des canons et des fusils dernier modèles. Ils représentèrent qu’il y avait eu déjà trop de sang versé, qu’il ne fallait pas sacrifier inutilement l’élite des Canadiens. Mais Nelson ne voulait pas accepter ce qu’il appelait un compromis avec l’honneur du nom.