pas l’injure à la mémoire de Papineau de prétendre qu’il ne fut que le père putatif de la révolution, sa virilité blessée en tressaillirait au fond de sa tombe. Les Frères de la doctrine chrétienne n’ont trouvé en lui qu’un orateur émule d’O’Connell. Nous ne pouvons leur demander d’avoir une vue d’aigle, mais comment ont-ils pu faire tenir en quelques paragraphes une série d’événements aussi mouvementés et dont l’action dramatique devait se dérouler au moins en cinq actes ? C’est un tour de passe-passe, dont peu de magiciens seraient capables. Depuis le petit enfant d’Augustin, qui voulait mettre toute la mer dans une coquille d’huître, aucune tentative aussi puérile n’a été osée. Comment ont-ils pu faire le vide dans ce grand cerveau et stériliser cette prose effervescente dont la lecture après un siècle, nous communique encore son enthousiasme ?…
Les martyrs de 37 au moment de plonger dans la grande ombre ont-ils eu au moins la consolation de savoir que leur holocauste porterait ses fruits ? Le sort leur devait bien cette compensation, car c’est terrible de voir étendu à ses pieds, noirci et dégonflé, le ballon lumineux qui les avait promenés en de hautes sphères. Après l’éclipse de Papineau, les ténèbres régnèrent sur Québec. Un vent de frousse souffla dans toute la province, les plus ardents confesseurs de la liberté rentrèrent sous terre. Certains renièrent leur maître et leur foi. Ils sentaient le sol trembler sous leurs pas et leur foi se désagréger. Les esprits se ressaisirent plus tard mais la hantise de l’échafaud en obséda un grand nombre, tandis que d’autres rendus furieux à la vue du sang versé, s’ancraient dans leur volonté de résister au désordre établi.
Nous étions au tournant de notre histoire. Si nous avions tremblé devant le bouledogue anglais, il nous dévorait. Mais de l’avoir regardé en face et bravé, il a rentré ses crocs et s’en est allé la queue entre les jambes. Si nous avions usé de la « constitutionnelle » comme Wilfrid Laurier a abusé de la « conciliation », nous n’avions qu’à prendre nos cliques et nos claques et à passer les frontières, où nous résigner à être parqués dans des réserves comme les indigènes. En voyant l’attitude agres-