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Page:Cœurderoy - Jours d'exil, tome I.djvu/186

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Personnage muet, le contrebandier me regarda jusqu’au fond des yeux, éclaira sa pipe noire, chargea mes effets sur ses épaules, et me conduisit par des sentiers étroits jusqu’à l’entrée d’un chalet caché dans un de ces massifs de sapins si nombreux au milieu des collines du département du Doubs. Je le suivis, respectant sa réserve.

La nuit, de son pied paresseux, montait lentement dans le ciel. La lune était brillante, et pas une des étoiles curieuses ne manquait à la splendeur que le ciel déploie sur la terre pendant les nuits d’été. Cependant, je ne vis le chalet hospitalier que quand le contrebandier heurta par trois fois à la porte solide. Tant il était caché dans la verdure, comme un nid d’oiseau, et tant on avait pris soin d’éteindre toute lumière à l’intérieur.

À l’appel de mon guide, une aigre voix de vieille femme répondit : — Qui va là ? — « Jura et libre commerce », murmura l’homme dont j’entendais la voix pour la première fois. Aussitôt les verroux crièrent, une chaîne de fer fut levée avec précaution, et la porte roula sur ses gonds. La vieille alluma dans l’âtre l’extrémité soufrée d’une tige de chanvre et la présenta à la mèche d’une petite lampe.

Alors on me fit descendre, par une trappe, dans une sorte de cave étroite, où je vis des ballots de marchandises déposés çà et là, sans désignation. Un homme ronflait, étendu sur une large caisse couverte de foin. L’air était chaud et rare. Je me demandai comment ces hommes des montagnes