Page:Cabanès - Grands névropathes, Tome III, 1935.djvu/185

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par delà l’obscurité actuelle, nous pressentons la lumière à venir ; la terre est une scène assombrie par la douleur, mais soyons patients : le cinquième acte nous révélera la signification de ce drame sauvage. »

« L’incrédulité, disait-il encore, est une muraille crénelée, une prison dans laquelle nous respirons un air malsain et où nos mouvements sont entravés ; ne la prenons pas pour une forteresse et cherchons à en sortir à l’aide de la prière. »

Tennyson a toujours espéré en un Dieu consolateur ; dès l’enfance il avait été sujet à des extases, qui ont, il faut le reconnaître, un caractère nettement anormal. Voici ce qu’il confesse à ce propos :

« Depuis mon enfance, j’ai fréquemment éprouvé une sorte d’extase à l’état de veille, quand j’étais tout seul. Cet état s’est produit généralement en me répétant mon propre nom à moi-même, silencieusement, deux ou trois fois, jusqu’à ce que, tout d’un coup, comme si c’était par l’intense conscience de mon individualité, cette individualité même semblait se dissoudre et s’évanouir dans un être illimité. Et cela n’était pas un état confus, mais le plus net parmi les plus nets, le plus certain parmi les plus certains, le plus merveilleux parmi les plus merveilleux…, la mort paraissait une impossibilité presque ridicule et la perte de la personnalité sem-