Page:Cadiot - Elisabeth Verdier.pdf/17

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— Quoi ?… Comme vous voudrez, répondit la jeune femme, se soulevant sur la chauffeuse où elle gisait à demi coiffée, à demi vêtue, et dans un abandon qui trahissait bien de la nonchalance ou bien de la préoccupation.

— Ce sera comme madame l’ordonnera, reprit la femme en baissant les yeux, et avec un accent composé qui trahissait une colère contenue.

— Mettez le service de Saxe.

— Et pour le nappage, que commande madame ?

— Le linge damassé, marqué en lettres gothiques ; le surtout d’argenterie ; la verrerie de Bohême. Que les fleurs et les fruits soient bien montés ! Et qu’on serve à la russe !

Madame Verdier donna ces derniers ordres d’un ton à la fois doux, mais un peu bref, qui semblait répondre en même temps au respect extérieur et à l’impertinence cachée de la matrone.

— Bien, madame.

Et la femme de charge fit la révérence et sortit. Mais au moment de refermer la porte, elle la rouvrit, et dit avec un ton plus mesuré encore que précédemment :

— Quand feu madame recevait le général, l’archevêque et le préfet, elle mettait le service de Chine et le linge à damier fleuri.

— Allez, répliqua madame Verdier, doucement, mais avec hauteur.

Cette fois, la matrone ne revint point à la charge.

Ce rapide dialogue eût été, pour un observateur, l’exposé de toute une situation.

Évidemment, la femme de charge supportait avec impatience le joug de sa jeune maîtresse. Sous une soumission apparente, on sentait la révolte. Non moins