Page:Cadiot - Minuit.pdf/100

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et vous refusez de l’accueillir ! Vous avez un frère en Amérique — un frère qui vous écrit ! — et votre cœur ne bat pas plus fort d’une pulsation à l’heure ! Papa Naigeot ! les huîtres ont plus de passion que ça !

— La fortune ! la fortune !… C’est peut-être, au contraire, pour m’emprunter de l’argent !… C’était un dissipateur autrefois que Dominique… tandis que moi j’ai toujours été un homme d’ordre et d’économie… et trois francs… c’est trois francs, après tout !

Les jeunes gens se regardèrent, de tous les bouts de la table, pour se faire signe d’exciter le bonhomme à retirer la fameuse missive. Alors ce fut un feu roulant d’apostrophes et de lazzis.

— Dites donc, Naigeot, cédez-moi vos droits ; et si le patron veut me faire crédit de trois francs, pour jusqu’au mois prochain, je me paye votre épitre et votre héritage, voulez-vous ?

— Tiens ! un oncle d’Amérique pour trois francs, ce ne serait pas cher ! — Je fais trente sous pour en avoir ma part ; — toujours à crédit, bien entendu.

— Moi vingt sous ! — à condition de partager la succession au prorata de ma mise, comme de juste !

— Eh bien ! cela fera quatre francs ! vingt sous de trop ! de quoi payer un grog, au papa Naigeot, notre bienfaiteur !

— filous donc, messieurs, pas de bêtises ! interrompit monsieur Buneaud d’un ton mêlé d’autorité et de bonhomie, d’un ton quasi paternel.