Page:Cadiot - Minuit.pdf/154

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croissante, s’abandonnait aux rêves les plus fous, aux projets les plus absurdes, le temps s’écoulait. Chaque jour, l’époque tant redoutée du mariage de Louise, s’avançait. Déjà, même, les préparatifs des fêtes occupaient toute la maison. On eût dit, que la mère avait l’intuition des passions mauvaises qui agitaient son beau-frère, et qu’elle désirait hâter le mariage.

Naigeot souffrait le martyre. Il aurait voulu empêcher le temps de courir, l’avenir d’arriver, les événements de s’accomplir. Mais, il se cramponnait en vain à des lambeaux d’espérance ; sa raison lui montrait sans cesse son impuissance, comme pour l’accabler. Il sentait toutes ses résistances inutiles, et cependant !… Cependant, au prix de sa vie, au prix de son âme, il voulait triompher !

Tout à coup, un bruit sinistre se répand dans la ville ; les promenades deviennent désertes, les maisons se ferment. On annonce, qu’avec les chaleurs de la canicule, la fièvre jaune est arrivée faire sa moisson annuelle. Les cercueils circulent ; les habits de deuil apparaissent de tous côtés ; chacun craint pour les siens, pour lui-même. Le fléau est, dit-on, plus redoutable que jamais. Il n’est pas une maison sans exposition funèbre ; pas une famille qui ne pleure un de ses membres.

— S’ils allaient mourir ! se dit Naigeot, en écrivant un compte sous la dictée de sa belle-sœur… Si trois bières me délivraient de la mère et des deux commis !…