Page:Cadiot - Minuit.pdf/161

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dressait en lui pour combat re ses passions déchaînées.

Qui la lui avait donnée ? D’où venait ce tyran importun ? Fallait-il lui obéir et se vaincre au prix, même de la vie ? Ou bien, au contraire, fallait-il chasser au loin ces scrupules indignes et saisir le bonheur, dût-on pour cela traverser le crime ?

Il était minuit ; tout le monde dormait dans la maison, tout le monde, hormis le teneur de livres qui ne pouvait trouver le repos.

Il sortit de sa chambre, où il étouffait, et erra comme une âme en peine le long des corridors.

Les portes matelassées s’ouvraient et se fermaient sans bruit ; les pas étaient assourdis par les tapis. Naigeot n’entendait que sa respiration haletante et pressée. Mais cette respiration même l’effrayait ; il aurait voulu la retenir et tâcher de pénétrer son âme du calme qui régnait autour de lui.

C’était en vain. Au contraire, plus ses pensées se rapprochaient de la vie réelle en s’arrêtant sur Louise ou sur sa mère, sur les commis ou sur Charles Moitessier, plus elles devenaient orageuses. Il y eut un moment où il perdit presque le gouvernement de lui-même ; sans se rendre compte de ce qu’il faisait, il leva doucement une portière qui cachait l’entrée de l’appartement de sa nièce. À travers une porte vitrée garnie d’un rideau de mousseline, il vit la lueur de la veilleuse comme un reflet d’opale dans le brouillard.

Insensiblement ses yeux se fixèrent sur cette lumière.