Page:Cadiot - Minuit.pdf/213

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Isobel ; madame Isobel, telle que l’avait vue tant de fois jadis le vieux serviteur !

Kraupt épouvanté voulut fuir ; mais ses jambes se dérobaient sous lui. Tout ce qu’il put faire, ce fut de saisir un rameau de buis au chevet de son maître et de le tremper dans l’eau bénite, pour en asperger l’alcôve et les rideaux.

Une goutte vint tomber sur le front d’Isobel. Elle frissonna, et s’essuya par un mouvement si naturel et si vivant, que le pauvre valet se prit la tête à deux mains, en se demandant à lui-même s’il n’était pas fou, s’il ne rêvait point à l’heure présente, ou s’il n’avait pas rêvé jadis lorsqu’il lui avait semblé voir mourir sa maîtresse.

Elle était là !… Elle quittait et reprenait tour à tour les mains du baron… elle le regardait… elle agissait comme une créature vivante…

Mais elle était plus pâle encore que par le passé ; le feu de ses yeux noirs contrastait plus étrangement avec ses cheveux ardents que les reflets de la lumière, sans doute, semblaient semer de jets de flamme, et ses lèvres, ses lèvres d’un rouge éclatant, faisaient ressortir plus encore la blancheur de ses dents acérées.

— Tu peux aller dormir, mon pauvre Kraupt, lui dit-elle d’une voix claire et douce comme celle d’autrefois, je veillerai pour toi cette nuit.

Le domestique s’élança d’un bond hors de la chambre et ferma les portes derrière lui, comme s’il eût craint