Page:Cadiot - Minuit.pdf/22

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des apparitions, ne comptez pas sur moi pour soutenir une thèse quelconque. Nous ne sommes guère d’un temps, nous autres fils du dix-huitième siècle, où les histoires merveilleuses avaient beaucoup de crédit. Les traditions romantiques remontent plus haut que cela, et il n’y a pas un bon conte, sans un sombre manoir, un donjon ruiné et une légende où les preux chevaliers soient mêlés au sinistre dénomment des amours d’Imogine et d’Alonzo, ou de tout autre couple macabre.

Pour moi, continua-t-elle avec un fin sourire, je n’ai jamais hanté au clair de la lune, les gothiques ruines de la blonde Allemagne, les antres ténébreux de la verte Erin, ni même les landes poétiques de notre Bretagne. En somme, je ne suis point superstitieuse, et je ne crois bien positivement qu’aux revenants politiques, et pour cause.

Je tiens pourtant de ma mère, l’histoire la plus inexplicable qui, jamais peut-être, ait été contée ; si je n’ai point été témoin oculaire, j’ai du moins été témoin auriculaire, car cette histoire est aujourd’hui le souvenir le plus frappant de mon enfance.

— Qu’est-ce ?

Cette question, pas une bouche ne la fit, mais tous les regards l’exprimèrent à la fois avec une véhémence qui ne permettait pas de faux fuyants.

— Bon ! dit-elle, voilà les enfants qui demandent à avoir peur du loup ou de M. Croquemitaine. — Eh bien ! vous serez fort désappointés, car, ce dont je parle, n’est ni un conte, ni un drame, ni même