Page:Cadiot - Minuit.pdf/224

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brillantes chaque jour. Des femmes inconnues arrivaient parfois avec les chevaliers : mais, le plus souvent, la Ressuscitée contraignait ses vassales à venir danser avec les seigneurs ; car les prudes femmes ou les châtelaines fuyaient Linkenberg, et même se signaient en voyant de loin ses créneaux brodés de feu.

On dansait, on dansait. Et les jeunes fous toujours plus enivrés, revenaient sans cesse brûler leur cœur près d’Isobel, comme les papillons aux lumières. C’était tantôt des courses, tantôt des carrousels, tantôt des fêtes brillantes. La contrée tout entière retentissait de fanfares et de cris joyeux.

Cependant le sire de Linkenberg, d’abord ranimé par le retour d’Isobel, d’abord si fier et si heureux de présider les festins et les danses, vieillissait avant l’âge.

Ce terrible châtelain, plus amoureux à chaque nouveau sourire de la fée séduisante qui lui faisait mener si grande vie, ne touchait plus que par jeu mie épée ou une masse d’armes. Toujours aux pieds d’Isobel, il baisait cent fois le jour ses mains longues et blanches, il étendait sur les dévidoirs les laines et les soies dont elle tissait de merveilleuses tapisseries, et s’endormait dans les délices de cette molle existence.

Mais, deux années à peine avaient fait de cet homme si fort et si renommé un débile vieillard. À le voir chevaucher, le dos voûté et le visage incliné sur le pommeau, de sa selle, on eût dit le père de cette vive et