Page:Cadiot - Minuit.pdf/233

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pour être de bonnes femmes !… Des jeunes filles comme ta sœur, Franz !…

— J’aime Isobel et je veux son amour, te dis-je ! — Tes remontrances m’excitent et voilà tout ! — Eh pardieu ! toi magicien, toi l’élève et l’ami du grand Corneille Agrippa, que ne me la livres-tu, plutôt, en conjurant le mauvais sort ?…

— Hélas ! mon ami, ne crois donc pas avec le vulgaire que nous autres savants nous faisons l’impossible ! Je sais distiller Veau ardente d’Arnaud de Villeneuve, cette eau limpide, qui s’allume en touchant le feu, et donne avec sa petite flamme bleue, sans lumière, une chaleur plus vive que les brasiers intenses[1] ; je sais, par la combinaison d’acides inconnus, fondre, dissoudre et transformer les métaux ; je sais… — Mais qu’importe ?… Nulle puissance humaine ne pourrait empêcher les regards d’Isobel de verser le poison dans ton âme, ses caresses de dévorer ta vie, ses baisers de te frapper de mort !

— Oh ! trêve de mensonges ! savant ou sorcier, tu peux faire quelque chose pour moi… Sinon, que serais-tu donc, toi, qui as guetté mes démarches et interrogé mon cœur ?… toi, qui viens de me conter cette horrible histoire… toi… qui t’es plu, qui te plais encore à remplir mon âme de terreur et d’espoir ?… — Allons donc ! tu peux me la donner !… et tu ne le fais pas, et tu ne veux pas le faire ?

  1. C’est Arnaud de Villeneuve qui, le premier, a fait de l’alcool.