Page:Cadiot - Minuit.pdf/301

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tion, l’insouciante enfant était le sujet de toutes les conversations des douairières et des femmes qui, pour une raison ou pour une autre, faisaient tapisserie.

— Voilà une petite fille, disait-on, qui accueille bien gaiment son malheur !

— Et qui fait ses plus jolis sourires à l’homme que la force même des choses fera son ennemi.

— Oh ! son ennemi, pourquoi ?

— Eh ! mon Dieu ! toute cause a ses conséquences ! M. Rouvières est heureux, aujourd’hui, d’épouser une femme dont la position lui permet d’aspirer à tout, et dont la fortune présente peut soutenir bien des prétentions. Mais, quand il faudra rendre à Pâquerette des comptes de tutelle, sa situation changera beaucoup. Et, croyez-vous, qu’en voyant grandir l’enfant, il ne songera pas fatalement au jour où elle lui prendra cet hôtel d’abord, le château de Marneroy ensuite, et puis encore quelque trente mille livres de rente……

— Mais il ne restera donc rien à madame Rouvières ?

— Quinze mille livres de rente à peu prés… — car, en se remariant, elle perd nécessairement sa pension de veuve de général — et, quand on est habituée à mener une si glande existence, c’est bien peu de chose… C’est le budget d’une veuve qui peut faire figure dans le monde sans conserver de maison montée, et non plus celui qu’il faut à Rouvières, qui veut devenir et rester un personnage.