Page:Cadiot - Minuit.pdf/311

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mement mécontent et redoutait de laisser voir son mécontentement. Après un instant de silence embarrassé il sortit.

Madame Rouvières nomma sa fille Pâquerette, en dépit de l’opposition sourde de son mari, et les grands-parents firent comme elle.

Ce n’était point bravade, car personne n’aurait résisté à une volonté franchement exprimée. Mais plus l’enfant se développait, plus il semblait, en effet, que la ressemblance avec sa sœur aînée devînt frappante.

Ses grands yeux, et ses sourcils noirs déjà bien arqués, lui donnaient surtout cette expression singulière qui faisait remarquer Marguerite de Marneroy. Et puis, si petite qu’elle fût encore, madame Rouvières et madame de Meillac prétendaient trouver une analogie de gestes extraordinaire. Il n’y avait pas jusqu’à ses souffrances enfantines qui ne fussent comparées à celles de la première née. On faisait observer cet étrange phénomène de ressemblance à tous les amis de la maison.

— C’est ma Pâquerette, disait la mère. L’aînée est morte, mais Dieu a eu pitié de ma tristesse, et voilà qu’il me la renvoie. L’âme de mon enfant chérie a passé dans ce petit corps, je reconnais ses regards, ses sourires…

Chaque fois que la conversation prenait ce cours, M. Rouvières quittait le salon avec un léger mouvement d’épaules.

— Vous haïssez donc bien la fille de monsieur de