Page:Cadiot - Minuit.pdf/43

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l’enseigne d’une taverne sans y entrer pour déguster le vin du Rhin ; et il n’en sortait guère avant que sa tête troublée et ses jambes titubantes eussent perdu la puissance, l’une de le conduire et les autres de le porter.

Malgré ces apparences de conversion, Ketha ne se décida pas facilement à épouser son fiancé. Elle pleura beaucoup, mais il fallait bien donner un appui à sa mère ; c’était œuvre pie, d’ailleurs, que d’achever la conversion de cette âme égarée.

Le mariage se fit sans éclat, et les jeunes époux allèrent s’établir dans la vieille maison de maître Hermann, le père, qui était mort en Terre-Sainte.

Cette maison située à quelque distance du village était construite sur pilotis et ne renfermait au rez-de-chaussée qu’une entrée fort étroite qui formait la cage de l’escalier et une sorte de cellier sombre où l’on serrait les provisions. En haut de l’escalier se trouvait l’unique chambre d’habitation de ce pauvre logis. Un grand lit à colonnes, un bahut, une large cheminée à manteau au-dessus de laquelle étaient accrochées quelques armes rouillées, et enfin un métier de tisserand, formaient tout le mobilier. C’est là, qu’avaient vécu de père en fils les aïeux d’Hermann, tous tisserands de leur état ; et c’est là que devaient vivre en travaillant comme d’humbles manouvriers, Ketha et son mari.

Tout alla bien pendant quelque temps. Les mères avaient enrichi le jeune ménage de tout ce qui leur