Page:Cadiot - Minuit.pdf/44

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restait, et le tisserand gagna quelques écus à faire de la toile ; mais une si belle conduite ne pouvait durer de la part de l’ancien compère de Fritz le pendu.

Bientôt Ketha remarqua que le métier restait immobile des journées entières ; son mari en allant à la ville prendre du fil ou porter de la toile, dépensait plus en un jour, à boire, qu’il n’avait gagné dans une semaine. Peu à peu la gêne remplaça l’aisance ; car les remontrances exaspérèrent le tisserand au lieu de le convertir.

Vers le même temps, Margareth, la mère de Ketha, mourut, et Barbel vint prendre place au foyer.

Alors Hermann voyant au logis une bouche de plus à nourrir, prit sa maison et sa famille en horreur ; il n’y vint que pour y boire et y manger quand il n’avait plus d’argent, et emporter tout ce qu’il pouvait vendre pour payer de nouvelles orgies.

Les pauvres femmes priaient et pleuraient.

Quand Hermann rentrait, ivre, chancelant, abruti, après des semaines entières d’absence, c’était pour passer comme un fléau dans son ménage, battre Ketha qui n’avait point d’argent à lui donner, injurier sa mère, et se faire maudire du village tout entier, à cause de ses débauches et de ses déprédations.

Un soir Barbel vieillie et courbée, moins par l’âge que par les chagrins, comptait en gémissant les dernières ressources de la famille :

— Ah ! ma chère enfant, disait-elle à Ketha, le Sei-