Page:Cadiot - Minuit.pdf/47

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— Je jeûne tous les jours.
— C’est ce qui te rend blême !
— Ne doit-on pas toujours
   Jeûner dans le carême ?
— … Je ne fais qu’un festin !
— Tu fais donc ton devoir ?
— Je commence au matin…
   Et je finis le soir !

Hermann montait l’escalier ; il poussa rudement la porte et fit son entrée en chancelant ; puis sans voir sa femme et sans saluer sa mère, il alla tomber comme une masse inerte sur un escabeau. Ses vêtements étaient débraillés et souillés de vin et de boue : ses yeux larmoyants jetaient autour de lui un regard vague.

— Ohé ! la femme ! cria-t-il en jurant, où est mon souper ?… Je veux mon souper, moi !… N’avez-vous point eu le temps de dresser la table, madame la paresseuse ?…

Ketha essuya ses larmes, et chercha vainement la force de répondre.

— Hé ! la belle prêcheuse ! avez-vous la pépie ? ou mons le diable m’aurait-il fait la grâce de vous tordre la langue, que vous ne sonnez mot ?

— Mon fils, dit enfin Barbel après un effort, taisez-vous, et laissez votre femme tranquille !… Vous n’avez que trop soupé, et loin du logis, où peu vous inquiète ce qui garnit la huche au pain !…

— Hum !… Qu’est ceci ? grommela Hermann sans trop se rendre compte encore du sens de l’admonition maternelle ; — suis-je donc, ou non, le maître céans ?…