Page:Cadiot - Minuit.pdf/54

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reur, comme vous êtes agité ! — Mais ne vous colérez pas toutefois, car voici la soupe de mes hommes qui bout, le lard est cuit, la bière est dans les pots, et j’entends mon Antoine qui fait son cri à l’entrée du chemin creux. Il est votre bon compagnon, et pouvez bien l’attendre le temps d’un Ave Maria !

Et tout en tenant ce discours, la vieille tira d’un bahut grossier quelques pots d’étain et quelques écuelles de bois, et les disposa sur la table pour faire prendre patience à son convive.

Pendant ces préliminaires, trois hommes arrivèrent, et après s’être débarrassés avec empressement de leurs armes et de leurs manteaux, ils s’assirent aux côtés d’Hermann en jurant contre l’ingratitude des temps.

Ces trois hommes étaient maître Antoine et ses deux fils.

Peut-être craignaient-ils Dieu et disaient-ils leurs patenôtres, maître Antoine et ses fils ; mais on leur faisait une étrange réputation dans la contrée.

D’abord, pour des charbonniers, on les voyait plus souvent en chasse et en maraude qu’à faire du bois, et leur maison tenue par une vieille à moitié sorcière, était devenue un cabaret assez mal famé où s’enivraient à la journée les mauvais gars du voisinage.

On contait à voix basse que plusieurs voyageurs étrangers, qui s’étaient égarés dans ces parages, n’avaient jamais revu leur pays, et que leurs manteaux avaient parfois été reconnus sur les épaules des charbonniers.