Page:Cadiot - Minuit.pdf/55

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Quoi qu’il en fût, les marchands forains et les colporteurs n’aimaient point à s’arrêter, nuit close, à l’auberge de maître Antoine ; mais on n’accusait point tout haut les charbonniers, car le père et les fils passaient pour être redoutables à leurs ennemis et faire payer cher les propos mal sonnants.

Hermann entretenait ses habitudes de fainéantise et de débauche dans la maison de maître Antoine. Pour continuer cette vie, le tisserand était capable de tout et Antoine l’avait bien compris. Aussi l’aidait-il, de la bonne façon, à faire sauter les derniers écus, qui lui restaient, sachant bien qu’une fois à jeun, et sans un frédéric, l’ivrogne lui appartiendrait tout entier.

Quand donc, après de copieuses rasades, Hermann osa se vanter de ses exploits de la veille, et raconter comment il avait mis l’ordre en son logis, Antoine applaudit de grand cœur à ce trait d’énergie.

— La peste soit, dit-il, des femmes pleurardes et geignardes qui point ne savent faire autre chose que se plaindre et réciter des patenôtres !… Vous auriez bien fait, mon maître, tandis qu’étiez en train, de nettoyer tout bellement la place, en mettant dehors la femme avec la mère ! C’eût été bon débarras !

— Et j’ose dire, reprit Hans, l’aîné des fils, qu’avec une jolie servante bien douce et bien obéissante, laquelle je vous tiens en réserve, c’eût été plaisir de faire de votre bicoque une gentille auberge, comme celle-ci, où, en hébergeant vos hôtes, eussiez pu vous héberger