Page:Cadiot - Minuit.pdf/66

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disparaissaient tour à tour derrière lui, muets témoins des distances franchies.

De temps eu temps il se retournait, vaincu par la fatigue : alors il voyait Fritz qui le suivait toujours à une égale distance, toujours d’un même pas mesuré et automatique.

En vain prenait-il un élan plus puissant, en vain franchissait-il d’un bond des espaces inouïs ; en vain dans sa course surhumaine rasait-il à peine la terre. … Le spectre, malgré la lenteur de sa marche, ne perdait pas un pouce de terrain.

Parfois même Hermann croyait se voir sur le point d’être atteint, et saisi de nouveau par la main terrible du pendu.

Alors l’effroi lui rendait des ailes. Il courait sans se retourner pendant des instants qui lui semblaient des heures ; et quand les forces lui manquaient et l’obligeaient à reprendre haleine, il retrouvait encore le fantôme derrière lui, et il n’y avait entre eux ni un pas de plus, ni un pas de moins.

La nuit était avancée ; la pluie devenue plus fine continuait froide et perçante ; un silence de mort régnait dans la campagne.

Mais le voyage infernal poursuivait son cours sans se ralentir. Le tisserand franchissait toujours des bois et des champs, et cependant il n’atteignait jamais le but de sa course. Il semblait que les distances prissent tout