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veste espagnole et la gaieté devaient lui aller à ravir.


« Vous pensez bien, poursuivit-il, que, vu ma fortune, les fêtes étaient rares. Mais quand il s’en présentait une, j’en jouissais de mon mieux. Ce soir-là, je me sentais disposé à profiter de tous mes avantages, à danser et à rire tant que j’aurais des forces, et je comptais bien que mes forces iraient au moins de minuit jusqu’au jour.

Nous ne pensions guère à souper. Jadis les étudiants allaient au bal pour danser ; s’ils soupaient, c’était comme par hasard, et parce qu’après une nuit passée à se démener comme des possédés, la faim leur tiraillait les entrailles ; alors nous mangions de la vinaigrette et du fromage de Brie : mais de quel appétit !

C’était la première fois que j’allais à l’Opéra. J’entrai fier de ma bonne mine, enchanté du bruit que j’entendais et de la cohue qui se ruait dans la salle, et comme si j’avais marché à la conquête des jardins Hespérides.

Je dansais bien, c’est-à-dire que j’étais fort sur les pas les plus échevelés des entrechats à la mode, et que je les exécutais avec le brio et l’entrain de la vingtième année.

Cette époque de la jeunesse se rapproche tant de l’enfance qu’on en a encore presque toute la fougue. Il semble que la vie surabonde