et qu’on ait besoin de la dépenser en exercices violents. Qui ne se rappelle avec quelle joie on monte, à vingt ans, un cheval fougueux, et l’ivresse que cause un temps de galop à travers champs ?
Je dansais donc : heureux des applaudissements des grisettes et de la grâce de mon costume, m’enivrant de musique, de fatigue et de bruit, ne faisant guère attention qu’aux mouvements de mes vis-à-vis, aux sourires des jolies pierrettes, aux miroitements des habits pailletés.
Tout à coup, pendant un repos, je me sentis touché sur l’épaule ; je tournai la tête, et je vis à côté de moi un domino noir, avec un masque à longue barbe, des manches fermées, un capuchon bien serré autour du cou et une ample pèlerine qui dissimulait la taille.
— « Tu t’amuses donc bien ? me dit-il avec un singulier accent de curiosité et d’étonnement.
— « Mais oui ! » m’écriai-je en reprenant avec entrain la figure que mon vis-à-vis venait d’achever.
Piqué au jeu par cette question, et aussi par la certitude que j’étais remarqué, j’ajoutai à ma danse de nouvelles fioritures, je développai avec complaisance la cambrure de ma taille et l’élégance nerveuse de mes jambes. Enfin, cependant, le quadrille s’acheva, il fallut s’arrêter.