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discrétion, et je promettais bien de la faire valoir auprès de Marguerite.

Alors, pour la première fois, je songeai à me demander quand elle viendrait, et si elle viendrait.

Ces deux questions, une fois posées dans mon esprit, agitèrent ma vie d’alternatives tristes et joyeuses. J’y rêvai sans cesse, bâtissant mille châteaux en Espagne sur mes espérances, ou me laissant aller à la mélancolie.

Dès le lendemain cependant, j’avais fait faire à ma chambre une toilette inaccoutumée. Il y eut de petits rideaux blancs à la fenêtre, un couvrepied d’indienne sur le lit et des housses pareilles sur les chaises.

Les jours suivants, je veillai moi-même à ce que le ménage fût proprement fait ; j’achetai deux vases à fleurs que je plaçai sur la cheminée, et où j’entretins continuellement des bouquets de violettes, pour ne pas être pris au dépourvu. Je faisais aussi des économies féroces sur mon ordinaire pour me mettre en mesure de pourvoir à ce bienheureux déjeuner que je devais offrir.

Peu à peu je montai mon ménage, j’eus deux verres, quatre assiettes, deux couteaux, une bouilloire, deux coquetiers : mais je vis bientôt qu’il m’était impossible d’arriver jusqu’à l’argenterie, et j’arrêtai mes dépenses en me résignant à recourir au restaurateur.