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Les jours et les semaines s’écoulaient pourtant et la belle Marguerite ne venait pas.

D’abord je m’étais dit : « Elle m’aime, elle est malheureuse, elle viendra malgré tout. » Mais je commençais à perdre cette confiance.

« Peut-être, pensais-je, a-t-elle peur de l’amour, et ne veut-elle pas jouer avec le danger…

« Peut-être aussi est-ce une femme prudente qui aime à toucher de ses lèvres le bord de la coupe, mais qui se contente de sentir venir le vertige sans lui laisser le temps de l’étourdir… — Eh ! qui sait ?… suis-je le premier qu’elle distingue au milieu de la cohue d’un bal masqué ?… Notre souper est-il unique dans ses souvenirs ?… Ne m’a-t-elle pas trouvé sot ?… »

Oui, je pensais tout cela, et mille choses encore, tant l’humanité, qui se sent faible, est prompte au soupçon ! puis, enfin, je cessai d’attendre. Mon cœur ne battit plus si fort quand, le matin, mon portier ou un camarade frappait à ma porte. Je revis Mariette, et repris ma vie ordinaire, mais avec un peu d’amertume et persuadé que j’avais à me plaindre du sort et… des femmes.

« Comme je l’aurais aimée pourtant ! » me disais-je parfois, lorsque je retrouvais dans mon cœur cette place choisie, ce sanctuaire où s’élevait, vierge encore, le piédestal de la première idole. Et, fouillant au fond de mes meilleurs