Page:Cadiot - Nouvelles.pdf/134

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sentiments, interrogeant toutes mes délicatesses, réunissant en gerbe toutes ces fleurs d’amour qui ne s’épanouissent qu’une fois, je les contemplais avec mélancolie, ne sachant plus à qui les offrir. Elles entouraient le piédestal vide sur lequel je lisais encore : « Au Dieu inconnu. »

Un matin cependant, longtemps après que je n’attendais plus, un matin que j’étais paresseusement étendu sur mon lit, jambe de-ci, jambe de-là, humant par ma fenêtre ouverte les premières brises du printemps, lisant mon code des yeux, et rêvant à mille choses vagues, j’entendis tout à coup un frappement pressé, un frappement ému, un frappement inusité, et qui avait un accent si expressif que je ne m’y trompai pas.

Je m’étais dit : « C’est elle ! » avant d’avoir sauté à bas de mon lit et réparé d’un coup de main le désordre de ma toilette.

Quand j’ouvris la porte, elle avait déjà fait quelques pas pour rétrograder. Le corridor était sombre, et d’abord elle ne me reconnut pas. Mais je m’écriai : « Marguerite ! » et d’un saut elle bondit jusque dans ma chambre.

Alors nous nous précipitâmes dans les bras l’un de l’autre : je la serrais sur mon cœur, j’embrassais ses joues, ses yeux, son cou, en murmurant d’une voix coupée par l’émotion :

— « Enfin !… c’est toi !… tu m’aimes !… »