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se trahissait par une pression rapide… J’étais ému jusqu’au fond de l’âme…

— « Marguerite, balbutiai-je, ne sommes-nous pas ici au bout du monde…, dans un paradis inconnu…, comme tu le souhaitais tout à l’heure ?… »

Alors elle me saisit et me pressa sur son cœur, et je vis une explosion de passion telle que je n’aurais osé la prévoir.

Ma belle amie semblait transfigurée…, ses yeux brillaient d’un éclat éblouissant, ses lèvres frémissaient, son teint semblait resplendir de flammes divines.

— « Oui, s’écria-t-elle, nous sommes heureux !… Oui !… Quoi qu’il arrive désormais, nous aurons connu des ivresses que rien ni personne ne saurait nous ravir… — Mais te donné-je à toi toutes les joies que tu me donnes ? Parfois, j’ai peur d’être égoïste… Ah ! si tu savais comme, pour moi, le monde finit au seuil de ta petite chambre ! C’est que, vois-tu, la vie est si triste au delà ! Il me semble que je m’agite dans les ténèbres…, que j’étouffe dans cette lourde atmosphère où tu n’es pas. Ces rapides instants que je vole pour les passer avec toi, j’y fais tenir les joies du paradis… Oui ! je voudrais posséder les richesses de Golconde pour payer avec des poignées de diamants et de rubis ces minutes de bonheur, de jeunesse et de liberté !…