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lirais-je pas ? reprit M. Martimont après un court silence, et avec un geste, avec un accent pleins de passion et d’éloquence. — Pourquoi ne vous la lirais-je pas !… puisque j’ai tout dit…, puisqu’une fois — après vingt ans — j’ai arraché le linceul de mon cœur…


La lettre est là, dit-il d’une voix attristée : elle ne m’a jamais quitté… C’est mon cilice, et mon trésor. »


Il défit deux boutons de son gilet, tira un médaillon d’or, l’ouvrit, y prit un papier et lut :

« Tu l’as voulu, Louis ; sans pitié pour moi…, pour toi-même… Tu l’as voulu, et les voilà brisés, nos liens si délicieux et si forts.

« Je ne te verrai plus ! ô Dieu ! est-ce donc vrai ! Je t’aimais tant ! Nous étions si heureux !… Et maintenant tout est fini !

« Quelle folie, quelle aberration t’ont saisi ? Mais non ! c’est moi qui étais folle : je voulais l’impossible… Et s’il avait duré, notre beau rêve, le ciel en eût été jaloux. Est-ce que le bonheur s’arrête ici-bas ?… Trop fortunés ceux qu’il caresse, en passant, du bout de son aile…

« Toi ! toi ! tu as essayé de m’avilir… Toi !… enfant adoré…, tu as cru que je pouvais être