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marteaux étaient muets, et on n’entendait qu’à de rares intervalles un coup frappé ou un grincement d’outil. Dans les ateliers poudreux, sous les auvents des portes, tout le monde dormait ou restait inactif. La comtesse promenait un œil distrait des statues aux hommes : les unes blanches et sortant, à demi taillées, de leurs blocs comme un beau fruit de sa gangue ; les autres vêtus de blouses bariolées et coiffés de bérets éclatants.


XIX

Tout à coup ses yeux se fixèrent et elle rougit. Au milieu d’un atelier où se mêlaient les terres fraîchement modelées, les plâtres et les marbres, elle vit son beau poète qui dormait, le col nu, les cheveux flottants, la poitrine enroulée dans une ample draperie de pourpre.

Par un instinct rapide, elle fit un pas en avant, pour éviter que l’attention de son mari ne se fixât sur le jeune homme ; mais, après avoir mis le comte hors de vue, elle ne résista pas au besoin d’admirer cet inconnu qui depuis la veille régnait dans son cœur.

Oui, régnait ! — Car toutes les pensées,