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homme plus tard, et que, présentement, je mènerais une vie d’anachorète, qu’il consentit à me laisser partir, quand j’eus fait le serment de revenir aux vacances suivantes avec mon diplôme, et sans dettes !

Sans dettes !… je tins ma parole pourtant ! Et voulez-vous savoir à combien se montait ma pension mensuelle ? — Soixante-douze francs tout secs !

Mais avec quelle joie je montai sur l’impériale de la diligence ! Comme je dis de bon cœur adieu à Beaulieu et à Lhoumeau ! Comme en traversant Poitiers je plaignais mes pauvres camarades qui ne pouvaient quitter les bords du Clain pour ceux de la Seine !…

Mes soixante-douze francs, en écus de six livres, accompagnaient de leur son argentin chaque cahot de la lourde voiture, et au son de cette musique, qui chantait l’espérance et la liberté, je me laissais bercer des songes les plus enivrants. Les jurements des postillons me semblaient mots d’amour, et j’aurais de bon cœur embrassé les chevaux frais à chaque relais.

Quand on montait une côte à pied, je courais en avant, comme si j’avais pu faire avancer la diligence par la force de l’exemple. J’engageais la conversation avec tous mes compagnons de voyage, je me serrais de bonne grâce pour leur faire place à eux et à leurs effets. Volon-