ses, et quelle puissance de dissolution ce sourire renferme ! Le monde semble se couvrir de ruines, et il ne reste debout, parmi tous ces décombres, que l’autel que le moi se dresse à lui-même. Ce n’est pas là le rire clair, joyeux et héroïque de l’ironie proudhonienne ! L’ironie ne nait pas ici d’une comparaison de l’infini et du fini, du moi infini avec les manifestation. toujours trop finies d’un monde fantomatique ; œuvre et ouvrier, ici, sont mis sur le même plan et se jugent avec la même modestie par rapport à un idéal, qui n’est pas le moi orgueilleusement déguisé, mais la création perpétuellement révocable de la liberté révolutionnaire ; c’est l’ironie du héros, qui, même au moment où il accomplit les actions les plus héroïques, ne s’en fait pas accroire, garde sa liberté d’esprit, et semble vous dire, un éclair de malice dans les yeux et la lèvre railleuse : « Oh ! ce n’est rien ! ne vous emballez pas, on peut faire mieux encore ! Ce que j’ai fait là est tout simple et n’était pas si difficile ! » Héroïsme bon enfant, volontiers gouailleur, plein de pétulance et comme endiablé, et qui, en même temps, conserve le parfait sang-froid et la sérénité souriante d’une âme entièrement maîtresse d’elle-même et d’un esprit où la clarté et la liberté du jugement restent inaltérées ; héroïsme, pour tout dire, à la française, d’une aisance, d’un naturel, d’une grâce inimitables, sans la moindre trace d’effort gourmé, de morgue et de raideur ; gai, spirituel (l’esprit est ici comme la pudeur exquise de l’action, une manière rapide, adorablement pudique, de se voiler, le mouvement de retraite d’une beauté qui semble demander pardon au monde d’être si belle et voudrait se cacher pour n’offenser personne : ne me regardez pas, écoutez-moi plutôt, implore-t-elle) ; avec une pointe de romanesque, nullement romantique (le cœur du roma-
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