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la famille chez proudhon et dans la démocratie

Aussi Proudhon attache-t-il une extrême importance au testament, cet acte solennel, « ce monument des dernières volontés, par lequel l’homme agit au delà du tombeau » et « affirme la continuation de sa présence, dans la famille et la société au sein desquelles il s’évanouit. »

Aujourd’hui « nous finissons la plupart comme des malfaiteurs. Point de communion sociale, point de paix pour nos derniers instants. » L’individu n’a rien à léguer dont il puisse s’honorer. Qu’importe donc l’avenir à ce vorace consommateur ? Périsse au besoin l’héritage, si le cher « moi » de l’individu peut en le gaspillant, éprouver quelques jouissances supplémentaires ! Proudhon tient un tout autre langage. Il défend l’entière liberté de tester : « Bien loin de restreindre la successibilité, je voudrais en faveur des amis, des associés, des compagnons, des confrères et des collègues, des domestiques eux-mêmes, l’étendre encore. Il est bon que l’homme sache que sa pensée et son souvenir ne mourront pas : aussi bien n’est-ce pas l’hérédité qui rend les fortunes inégales, elle ne fait que les transmettre. Faites la balance des produits et des services, vous n’aurez rien contre l’hérédité. »

III

Tel est l’enseignement de Proudhon. Ses thèses, qui paraissent aujourd’hui si étonnantes, sont pourtant ce qu’il y a de plus simple au monde. Il n’y a qu’à ouvrir les yeux, qu’à faire appel à ses souvenirs, qu’à invoquer sa propre expérience pour être persuadé de leur justesse. Tout au contraire, pour les combattre, pour les déclarer, dédaigneusement, « renversantes », il faut se faire violence ou plutôt il faut céder à ses passions. J’insiste sur