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notre première année

J’ai trouvé quelque chose de naïf et d’étrange dans les extraits du Mouvement Socialiste que vous avez reproduits : Lagardelle reproche aux socialistes français de ne pas s’occuper de Proudhon ; il affirme que la pensée de celui-ci doit vivre et se mouvoir (?) parmi ses amis politiques ; il espère que les socialistes, sentant l’infamie de leur situation, se mettront à étudier Proudhon. Mais les socialistes difficiles pourraient lui demander pourquoi il ne fait pas de sa revue un organe proudhonien ; je crois qu’il n’a autour de lui aucune personne qui soit capable d’écrire avec une certaine autorité sur Proudhon. En se tenant en dehors du cercle d’idées dans lequel se mouvait Proudhon, ne contribue-t-il pas à démontrer que Proudhon est devenu étranger au socialisme actuel ? Il est très important d’observer, dès qu’on commence à lire Proudhon, que son œuvre est délaissée par les socialistes ; il appartient désormais à tout le monde et il a le droit d’entrer triomphalement dans la littérature française. Toutes les objurgations de Lagardelle ne peuvent rien contre le fait historique : le mouvement historique qui a pratiquement exclu Proudhon du socialisme montre mieux que toutes les dissertations scolaires, que les parties qui furent jadis si acclamées par les socialistes ne sont pas les parties durables de son œuvre. C’est en dehors de ce qui se rattache très directement au socialisme qu’il faut donc chercher les doctrines qui assureront à Proudhon une place éternelle dans notre pensée. Les sophismes au moyen desquels on essaiera (à la suite de Bouglé et Cie) de reprendre Proudhon ne sont d’aucune valeur, parce que le mouvement historique a établi, très clairement et irréfutablement, que Proudhon est étranger aux idées qui sont fondamentales dans la démocratie avancée. Les philosophes ne se rendent pas toujours compte de la force de l’argument tiré du mouvement historique. Au moyen d’abstractions scolaires, on peut tout démontrer. L’histoire fait la séparation réelle des choses hétérogènes. Il serait curieux de relever les opinions que démocrates et socialistes émettaient sur Proudhon à une époque où, ne se sentant pas menacés, ils ne cherchaient pas à annexer à leur parti la gloire du grand écrivain de Besançon.

M. Maxime Leroy. — La belle lettre de notre éminent correspondant clôt la discussion, que ne sauraient rouvrir les mornes plaintes d’un écrivain très naïf, M. Maxime Leroy, dont nous ne reproduisons la protestation funéraire que pour amuser nos lecteurs. M. Maxime Leroy a écrit, dans la Grande Revue