Page:Cajot - Éloge de l’âne.djvu/17

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chante avec grâce : Son père est un gros individu, un jarret raide, a la mâchoire lourde, il sait à peine signer son nom. D’où vient cette différence ? est-ce de la nature ? Non : de l’éducation c’est l’ouvrage.

Un cheval lève la tête avec noblesse ; il caracole, il voltige, tous ses pas sont mesurés : est-ce donc étonnant ? Dès sa plus tendre enfance, on le soigne, on le dresse, on l’instruit, tandis que l’âne abandonné à la grossièreté du dernier des valets, ou à la malice des enfants, bien loin d’acquérir, ne peut que perdre par son éducation. S’il n’avait pas, dit M.  Buffon, un grand fond de bonnes qualités, il les perdrait par la manière dont on le traite : il est le jouet, le plastron, le bardeau des rustres qui le conduisent le bâton à la main, qui le frappent, qui le surchargent, l’excédent sans précaution, sans ménagement. Quand ce serait le plus dangereux, ou le plus inutile des animaux, on ne l’éleverait pas plus durement.

Il est évident que sous de pareils maîtres, et avec de semblables principes, il n’est pas possible que l’âne ait les mêmes