Page:Cajot - Éloge de l’âne.djvu/64

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qui varie, qui chancèle dans son sentiment ; on rit de Soliman qu’un petit nez retroussé fait penser à la Babylonienne, et lorsqu’un âne est constant dans ses résolutions, on dit c’est un opiniâtre, un entêté. Une pareille inconséquence suffit pour détruire ce premier chef d’accusation.

J’ai entendu dire à mon grand-père que les ânesses de Babylone ont donné la vogue à cette calomnie : mon enfant, me disait-il souvent, si jamais tu vas dans cette ville, prends garde aux ânesses ; elles affectent une physionomie douce ; on dirait que la simplicité coule de leurs lèvres, l’orgueil et la vanité siègent dans leur cœur. Ne te laisse jamais prendre dans leurs filets, soit en leur présence, soit en leur absence, dis toujours ce que tu penses, et pense toujours vrai. Je sais qu’en suivant mes conseils elles te détesteront ; tu passeras pour un impoli, un entêté ; n’en sois point alarmé. La haine des sots est le trésor du sage.

J’ai reconnu depuis, par ma propre expérience, que mon grand-père n’avait