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Page:Cajot - Éloge de l’âne.djvu/87

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regards ! Où vont ces ânesses ? Ô toi qui les conduit en faisant claquer ton fouet, et crachant des injures au nez des passants, parles ! Instruis-moi, où diriges-tu tes pas ? Quoi, tu vas dans le palais des grands ! Ces animaux qu’ils méprisent, leur sont donc nécessaires ! Oui sans doute, ils leur sont nécessaires : victime des plaisirs qu’ils ont tant désirés, le nectar des dieux s’est changé pour eux en poison. Leur santé ébranlée, leur corps chancelant, tout chez eux annonce un dépérissement total. À qui s’adresseront-ils dans ces tristes moments ? Quel objet dans la nature sera capable de les arracher des bras de la destruction ? Seras-ce vous, lions superbes, tigres furieux, terribles léopards ? Non ; loin de sauver leurs jours du naufrage, vous les engloutiriez aussitôt. Seras-ce vous, froids habitants de l’onde, ou bien vous, délicats volatiles, perdreaux, bécasses, faisans ? Hélas ! Vous êtes la plupart les auteurs de leurs douleurs cruelles ; loin de les soulager, vous redoubleriez leurs tourments. Cédez la place à cette ânesse