Page:Cajot - Éloge de l’âne.djvu/99

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solation, Sancere fut assiégée et réduite aux dernières extrémités : on mangea les rats, les souris, et comme les chats devenaient inutiles, on les mangea aussi. Les ânes furent seuls épargnés : on aima mieux se nourrir des plus vils excréments, que de faire périr ces utiles animaux. Cependant la disette augmente, tout manque, et il n’arrive aucun secours. On se résolut enfin à manger les ânes : c’était une désolation que de voir les repas de ces pauvres sancerois. Non jamais la tendre Héloïse n’a tant soupiré en écrivant à Abeilard. Jamais Candide n’a fait entendre des cris aussi aigus sur la mort du docteur Panglos, que Sancere en mangeant des baudets. Quand il fallut tuer le dernier, la pitié s’empara de tous les cœurs, la perte de ce dernier reste du plus précieux des animaux, fut pleurée plus amèrement que celles des premiers nés d’Égypte, et l’on ne peut douter qu’il ne se soit trouvé des sancerois assez généreux pour préférer la mort à une vie conservée au prix de celle d’un âne. Sancere, Sancere, petite ville du Berry, tu